Il était un petit jardin...

L'une de mes premières démarches lorsque nous avons pris la décision de rentrer en France métropolitaine, en l’occurrence à Lille, a été de rechercher un jardin partagé. Ayant fait le choix de vivre en centre-ville, qui plus est en appartement, l'accès à un jardin me semblait capital. Nous aurions pu nous contenter de parcs urbains, celui de la Citadelle notamment est plutôt sympa. Mais c'est une autre dimension que je recherchais. Ayant eu l'expérience à Singapour du jardin communautaire, c'est cet aspect de partage, d'apprentissage, d'engagement citoyen que je souhaitais retrouver. Et ça n'a pas été bien compliqué (merci internet !). Nous logions encore en airbnb que nous foulions déjà la terre de ce qui est à présent notre petite bulle de verdure parmi les briques et le béton. L'été chantant notre arrivée, nous avons pu prendre part à la fête annuelle du jardin de notre quartier et rapidement nous y intégrer. Ce jardin touffu que l'on n'imagine pas aussi joli depuis la grille, fait parti du réseau des Ajonc. Les objectifs globaux sont de reconstituer la biodiversité locale, enrichir le sol, construire du lien social et un écosystème humain, gérer collectivement un espace partagé.

Après bientôt une année passée dans ce jardin, nous avons pu observer les changements de saisons, les couleurs, les sons, les fruits, les odeurs, les bourgeons, les fleurs... Ayant vécu les cinq dernières années entre Equateur et Tropique, ces modifications nous ont vraiment interpellés. 

Nous avons goûté aux kakis en crumble et fait de la compote avec les pommes tombées au sol. Nous avons mangé de la soupe d'ortie, bu des infusions de cynorhodon. Nous avons planté des herbes aromatiques, des cosmos, des choux et du melon. Nous avons poncé des planches, peint et identifié des arbres. Nous avons fait la tournée des bars pour récolter du marc de café et avons injecté du mycélium dans une botte de paille caféinée. Nous avons vu des pleurotes émerger et s'épanouir de toute leur corolle avant de finir en omelette dans nos assiettes. Nous avons vu des endives pousser, nous nous n'aimons toujours pas leur goût, mais nous les trouvons belles.

Nous avons d'abord fait connaissance avec des grenouilles avant de découvrir cette saison les têtards dans la mare. 

Nous avons collecté les oeufs des poules et leur avons apporté à manger. Joshua a gratouillé leur terre et les a reconduites au poulailler tel un berger quand elles étaient vagabondes dans le jardin.

Nathanaël aide dès qu'il le peut Marie à nourrir les chats. Il a la semaine dernière sauvé un petit oiseau tombé de son nid. 

Chaque semaine nous déversons nos déchets alimentaires dans le bac à compost et découvrons un peu plus loin, dans les buttes, la nourriture qu'il apporte aux cultures potagères. 

Nous rencontrons en ce lieu les habitants du quartier, pour jardiner ou autour d'un repas partagé. Pour l'occasion, Viktor allume le four banal et enfourne des pizzas et des bananes. 

Nous avons aussi pu bénéficier des connaissances et de l'expertise de Claude, apiculteur, qui nous a montré avant l'hiver puis au printemps comment il observait la santé de la colonie d'abeilles qui butinent au jardin. Ici pas de récolte de miel mais une cohabitation bénéfique pour chacun. 

 Nous nous estimons chanceux d'avoir accès à ce jardin, lieu de découvertes, de liens et de ressourcement.